La compagnie Bobèche nous présente une noblesse britannique dépourvue de morale, et libertine à souhait. Le texte humoristique, écrit par l’un de ses membres, entraîne le spectateur dans un tourbillon de fresques amoureuses, où la chasteté représente l’ennui et où l’arrivée d’une jeune puritaine timide va exacerber la méchanceté de chacun. Une pièce à caractère classique rendue, par une mise en scène simple et un jeu d’acteurs réussi, agréable, légère, et accessible à tous.
Le rideau s’ouvre dans le salon austère du manoir anglais de lady Winscombe. Y évoluent Graham et Lorenzo, ses deux gendres libertins, sa peste de fille Ann, l’aristocrate Valtemand, Tacfarinas, l’intendant, et Friday, le servant. Tout ce petit monde verra son quotidien épicé par l’arrivée de la jeune cousine : Pearl Landskey. Venue tout droit de Bristol, ce “coquelicot parmi les orties” va être au centre de toutes les attentions, et la victime des plus viles intentions. Sa cousine lady Winscombe, animée par un esprit de vengeance tenace, lancera le défi à ses deux gendres de la « déflorer ». On découvrira alors le visage de cette perle puritaine, moins naïve qu’il n’y paraît.
A Loring Castle, les amours de chacun semblent être la seule attraction de ce monde superficiel et lointain. L’intendant, privé de son amour propre, manquera sa vie dans l’espoir de partager celle de Lady Winscombe, le valet profondément sot et gentil, sera de son côté pendu au cœur de la petite Pearl. Graham et Lorenzo, les compères de chasse féminine, poursuivront leurs tentatives vaines de séduction, chacun dans leur registre : la virilité de l’homme rustre et brutal pour l’un, la subtilité snobinarde pour l’autre. La jeune Ann, aussi libertine que son époux, enrichira cette pièce d’une présence suave et drôle malgré elle, tandis que le chevalier Valtemand jouera à la perfection son rôle de caricature bourgeoise, perruque blanche à l’appui ! Tous ces caractères bien trempés se dessinent autours de « la nouvelle acquisition » : Pearl Landskey. Après la présentation de son personnage, sage, discipliné, pur, se déroule le second acte. Douze jours après son arrivée, on ne parvient plus à reconnaitre cette jeune fille. Cache-t-elle son jeu, ou s’est elle laissée entraîné par les règles de la maison ?
Avec un décor simple, un jeu de lumière et une musique discrets, le jeu des comédiens parvient finalement à envoûter la salle. Grâce aux dialogues légers et fins, des costumes soignés, et des personnages poussés aux frontières du ridicule, cette pièce se révèle être un délice de facéties libertines d’une époque puritaine révolue. On ne regrettera, dans cette mise en scène dynamique, que la pause marquant les douze jours écoulés : le rideau se ferme, il détourne l’attention des spectateurs qui s’imaginent un changement de décor ou autre surprise, et se réouvre sur la même scène…
Plus rien ne choque à notre époque, mais la bienséance hypocrite fait sourire, et l’on s’attache vite à cette troupe sympathique pour qui « faire rire son prochain est signe de générosité ». L’intrigue, bien que courue d’avance, nous plonge dans l’esprit de la maîtresse de maison : seule et entourée de personnalités superficielles qui n’aiment d’elle que son héritage. Elle finira par retrouver son quotidien : la solitude et l’ennui.
Une certaine noblesse du vice
de Philippe Langlet
Mise en scène : Alexandra Lisbonne
Avec : Maximin Bessi, Tiphaine Daviot, Gerdie Desjars, Maryvonne Dupas-Ladoucette, Jean-François Elberg, Rémy Gicquel, Philippe Langlet, Philippe Seas, Philippe Simon
Texte : Philippe Langlet
Mise en scène : Alexandra Lisbonne
Musique : Fabien Ladoucette
Décors : Alexandra Cervera
Costumes : Maryvonne Dupas-Ladoucette
Durée : 1h30
Photo : © Alexandra Lisbonne
Production : Co-Réalisation Les Déchargeurs / Bobèche en accord avec les productions du Château
Publié le 15 avril 2011
https://www.ruedutheatre.eu/article/1319/une-certaine-noblesse-du-vice/
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